Interview d’un spécialiste du droit suisse de la circulation routière

Nous avons interviewé un avocat spécialiste de la LCR qui a bien voulu nous accorder un peu de son temps pour répondre de façon franche et complète à nos questions. Me Timothée Bauer exerce à Genève et s’intéresse particulièrement au droit de la circulation routière.

Bonjour Maître, pouvez-vous nous raconter en quelques mots dans quelles circonstances vous vous êtes intéressé au droit suisse de la circulation routière ?

Cela découle d’un intérêt personnel pour l’automobile. J’aime les voitures, mon entourage et mes amis aussi. J’ai donc logiquement, durant mes études, choisi de faire mon mémoire de master dans ce domaine, soit « la responsabilité civile en cas de vol de véhicule » sous la direction du Prof. Sylvain MARCHAND. En parallèle, j’ai également donné des cours de « prévention routière » durant 4 ans dans les écoles du secondaire genevois. Il s’agit de petits cours d’une heure, une fois par année. Je les ai très vite orientés sur les risques « légaux » d’infraction aux règles, soit retrait de permis et sanction. Et j’ai constaté, paradoxalement, que c’était souvent plus percutant que de parler à ces jeunes gens des conséquences d’un accident par exemple !

Quels aspects trouvez-vous spécialement intéressants dans ce domaine du droit ?

Dans la pratique concrète du métier d’avocat, j’ai l’impression de pouvoir être utile à mes clients, et aussi d’éviter des erreurs judiciaires. À la base, dans ma motivation profonde, je suis un pénaliste. Ce que j’aime dans le fait d’être avocat, c’est de protéger le citoyen contre l’arbitraire, contre la machine de l’Etat qui broie parfois implacablement les gens. Les nouvelles règles en matière de circulation routière sont extrêmement sévères, par conséquent mon activité dans le domaine du droit de la circulation routière ressemble beaucoup à celle que je pratique en droit pénal normal. Risquer un an de prison, risquer 2 ans de retrait de permis, c’est un peu le même type de travail pour défendre les personnes qui se voient accuser de faute sur la route.

De plus, comme pour le droit pénal qui est ma vocation première, il est possible d’être créatif et le débat se situe sur l’établissement des faits. Il y a donc une enquête – qu’il faut parfois mener soi-même à décharge pour le client – et cela m’a toujours plus attiré que la rédaction de mémoires de 300 pages, comme dans d’autres domaines du droit.

S’ajoute à cela le fait que j’ai également une conviction politique en la matière : je trouve que notre système est actuellement trop sévère. Nos politiciens poursuivent le mirage de la « sécurité absolue » et du « zéro mort » sur nos routes. C’est une chimère ! Sauf à brider tous les véhicules à 20 km/h et à obliger tout le monde à porter un casque intégral dès qu’il sort de chez soi. Mais ne parlons pas trop vite, cela pourrait arriver… Ce qu’oublient ces politiciens, qui surfent sur la vague populiste du tout sécuritaire, c’est qu’il faut mettre en balance la « sécurité gagnée » avec les contraintes imposées aux citoyens par ces règles. En l’espèce, les contraintes sont énormes et les automobilistes se retrouvent actuellement persécutés et ruinés, quand ce n’est pas incarcérés. Quant aux gains en termes de sécurité, ils sont dérisoires en comparaison avec ce gaspillage de force, de liberté et d’argent que représente le « tout sécuritaire » routier.

Si vous aviez un seul conseil à donner aux conducteurs en rapport avec ce droit, quel serait-il ?

Premièrement de ne pas faire le malin. Le mieux reste de ne pas commettre de faute, car les solutions qui existent pour s’en sortir ensuite sont très incertaines. Même avec un bon avocat, le citoyen ne pèse pas lourd face à la machine étatique du tout sécuritaire et une administration qui le bombarde de lettres et de sanctions « type ».

Ensuite, et plus concrètement, ne jamais oublier que vous avez le droit à un avocat dès la première minute. Vous avez aussi le droit de ne rien dire jusqu’à son arrivée. Et tout ce que vous dites sera retenu contre vous. comme dans les films américains !

Cette litanie que tout le monde connaît par cœur est en fait un très sage conseil… surtout si vous avez bu ou que vous êtes choqué suite à l’accident. Les policiers jouent très souvent aux « gentils » pour amadouer les prévenus et les faires parler sans avocat. Cela marche très bien, c’est leur job d’ailleurs. Le mien, c’est le contraire : il faut voir les preuves avant de parler. On peut toujours rajouter une nouvelle déclaration, mais jamais en enlever une au PV. Un mot de trop du client peut couler un dossier.

Un dernier « pour la route » : attention aux délais très très courts des lettres envoyées par la justice ou le Bureau des autos, souvent 10 jours, parfois 6. Si vous voulez agir, il faut le faire immédiatement et pas n’importe comment… les arguments du type « J’ai besoin de ma voiture, pitié ! » ne servent à rien. C’est au niveau de la procédure et des preuves qu’on peut tenter d’agir, il est donc très difficile de se passer des conseils d’un avocat spécialiste si l’on a choisi de se battre.

Ajoutons à cette interview que Me Timothée Bauer édite le site sos-permis.ch sur lequel figurent de nombreuses informations utiles pour celles et ceux qui s’intéressent au droit suisse de la circulation routière. Vous pouvez également vous rendre sur le site professionnel de cet avocat spécialiste de la LCR et découvrir davantage d’informations sur sa personne ainsi que les services qu’il propose.

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